Pour
la deuxième fois en dix-huit mois, François Hollande voit sa vie privée
bouleverser son action politique. Une situation qu'il semble avoir du mal
à gérer.
(
fp.com/Eric
Feferberg )
A
ce rythme-là, le quinquennat de François Hollande va se terminer sur les
planches d'un théâtre de boulevard. Avant même d'en avoir bouclé la
première moitié, il a déjà donné la réplique dans deux vaudevilles :
Madame tweete ! et La Garçonnière.
Le 12 juin 2012, Valérie Trierweiler affiche, sur Twitter, son soutien à
Olivier Falorni, candidat dans la circonscription législative de La
Rochelle face à Ségolène Royal investie par le PS. Malgré lui, le chef
de l'Etat se trouve entraîné dans un triangle amoureux, qui fera prospérer
pendant des semaines un sketch des Guignols de l'info -Hollande en mari
tyrannisé par ses ex et actuelle compagne. Le 10 janvier 2013, changement
de distribution: autour de François Hollande de pousser Valérie
Trierweiler sur la scène d'un Feydeau. Et là, ce sont les médias étrangers
qui évoquent "des portes qui claquent comme dans une farce française".
Ces comédies ne font évidemment pas rire François Hollande. Cette
situation où vie publique et privée se télescopent est particulièrement
inconfortable pour un président qui se voulait normal. Dans L'Homme sans
com' de Denis Pingaud, le chef de l'Etat évoquait la difficulté de sa
fonction et l'un de ses paradoxes: "Je suis le président de la République.
Ma personnalité ne peut pas transgresser ma responsabilité (...) D'un côté,
les Français estiment à juste raison que le chef de l'Etat doit avoir
une forme particulière d'expression, de démarche, de mouvement. De
l'autre, ils veulent en savoir toujours davantage sur l'homme, sa vie
personnelle, qui il est, comment il vit."
Selon
le magazine Closer, le chef de l'Etat entretiendrait une liaison avec
l'actrice Julie Gayet.
Reuters
Il
n'y a pas que dans l'Hexagone qu'on en parle. Les médias européens se
sont immédiatement emparés de la révélation vendredi, par le magazine
français Closer, d'une liaison prêtée au président français François
Hollande avec l'actrice Julie Gayet, centrant leurs interrogations sur
l'impact de cette affaire. Faute de détails croustillants ou de
rebondissements, la plupart se contentent de rappeler les précédents
chez les présidents français ou optant, notamment en Italie, pour une
approche légère et people de cette liaison présumée.
A Londres, le site internet de la BBC a bondi vendredi sur ces
affirmations en les plaçant en dominante mondiale pendant quelques heures
dans la matinée avant de les rétrograder en troisième titre
international.
Les journaux britanniques de samedi évoquent l'affaire en première page,
même le très sérieux Financial Times (FT) qui tout comme le Times
consacre à ces révélations un éditorial soulignant l'importance prise
par cette affaire dans l'Hexagone.Le Timess'amuse à publier une sorte
d'agenda fictif du président en franglais, où celui-ci affirme: "Je
suis le sexy, dirty chien!" Le FT, qui publie une photo de l'actrice
en première page, prend dans un éditorial la défense du président français,
qui doit pouvoir "manger ses croissants en paix"
"Une nouvelle crise"
Moins charitable, le Daily Telegraph affirme que François
Hollande"fait face à une nouvelle crise": "Avec une
impopularité record, la dernière dont le président socialiste a besoin
est un autre scandale d'alcôve". "Les liaisons ne sont pas une
nouveauté dans l'histoire des présidents français",
relativise-t-il.
"Oh là là!": plusieurs médias allemands ont choisi cette
interjection en français dans le texte comme accroche. Évoquant une
"affaire d'Etat" - un jeu de mots, puisque "Affäre"
en allemand signifie également une liaison sentimentale - le site
internet de Bild se sent toutefois obligé d'expliquer que "les Français
sont particulièrement habitués aux frasques sentimentales de leurs présidents
en exercice", en rappelant que Nicolas Sarkozy avait entamé une
relation avec Carla Bruni après le début de son mandat, avant de l'épouser.
"La vie privée se réduit comme peau de chagrin"
Le très sérieux quotidien économique Handeslblatt évoque "la
surprenante réaction unanime des hommes politiques français qui
condamnent la violation de la vie privée du chef de l'État" sans
"essayer d'exploiter" politiquement l'affaire. Pour l'expert
britannique en relations publiques Mark Borkowski, "l'opinion
publique dans le monde s'attend à ce genre de choses de la part des présidents
français". "C'est une tempête dans un verre d'eau", renchérit
Jean-Jacques Jespers, expert belge des médias interrogé par La Libre
Belgique. "C'est du ressort de sa vie privée, et de surcroît il
n'est pas marié à Valérie Trierweiler (sa compagne), il n'y a donc pas
d'adultère".
En Belgique, où Closer a été imprimé, on s'interrogeait sur cette maîtresse
présumée, une quasi inconnue à l'étranger. "François Hollande
aurait une liaison amoureuse avec une actrice: qui est Julie Gayet?",
s'interrogeait en titre le site de la chaîne de télévision RTL-TVI. Citée
dans La Libre Belgique, une avocate spécialisée dans le droit de la
presse, Delphine Meillet, juge queCloser a "franchi un pas de
plus". La vie privée, pourtant très protégée par la loi française,
"se réduit comme peau de chagrin", ajoute-t-elle, estimant
qu'"il y a quelques années, ils ne se seraient jamais autorisés à
le faire".
"Personne n'aime Valérie Trierweiler"
La plupart des journaux espagnols ont placé vendredi soir le sujet en Une
ou très haut sur la première page de leur site internet. El Pais
(centre-gauche) titre: "L'annonce d'une liaison secrète énerve
Hollande", ajoutant un lien qui renvoie à un ancien article intitulé
"personne n'aime Valérie Trierweiler". El Mundo (centre-droit)
consacre un portrait à l'actrice intitulé "Qui est Julie Gayet?".
Avec sa photo en Une, le journal catalan La Vanguardia décrit "une
femme de talent et discrète".
Le premier journal italien, Il Corriere della Sera, ne diffuse qu'une
galerie de photos sous le titre: "Hollande a une maîtresse. Les
photos sur un site people". Le quotidien turinois La Stampa, dans un
article daté de Paris, rappelle que "la France, forte d'une ancienne
tradition de libertinage, entre histoire, cinéma et littérature, s'est
toujours montrée tolérante à l'égard des histoires conjugales et
extraconjugales de ses présidents".
Outre-Atlantique, Time magazine publie un court article accompagné d'une
photo de l'actrice et intitulé "Qui est Julie Gayet?". Le site
de CNN publie un éditorial du Canadien Matthew Fraser, professeur à
Sciences Po Paris, qui estime que les allégations de liaison "sont
une distraction bienvenue" pour les Français et "pourraient même
l'aider (le président) dans les sondages".